Normes technologiques : innovation et concurrence

Normes et technologies sont deux créneaux porteurs de valeurs stratégiques pour l’innovation et le développement économique et social. Les normes promeuvent l’innovation qui se décline entre autres en technologies nouvelles et sophistiquées. L’innovation transforme la façon de faire du business et stimule ainsi la croissance d’une entreprise qui fonctionne dans le plein respect des normes et des standards internationaux pour des raisons de qualité et de compétitivité.

Normes et technologies sont deux créneaux porteurs de valeurs stratégiques importantes pour l’innovation. Il est donc normal que chacun tente de s’approprier ces deux mécanismes régulateurs du marché des TIC et cherche à créer un rapport de concurrence stimulé par les mêmes raisons idéologiques ou matérielles qui l’animent. Essayons alors de comprendre les mécanismes qui contribuent à faire de ces deux créneaux, des facteurs d’innovation incontournables. Observons ensuite ces mécanismes à travers des modèles de mesure utilisés pour étudier et prévoir les conditions dans lesquelles l’innovation technologique, et donc la concurrence, se manifestent.

Pour comprendre les plus-values réelles apportées par les normes et les standards pour l’innovation technologique, il est nécessaire de tracer à grands traits une analyse de l’intérêt que la compatibilité et l’interopérabilité apportent aux transformations économiques engendrées par les TIC. En quoi l’interopérabilité technologique s’avère-t-elle nécessaire du point de vue du bien-être social ? Comment parvenir à la mettre en oeuvre sans perturber ni les équilibres économiques ni la créativité des services innovants des entreprises ? Peut-on d’ailleurs parler d’une économie de l’interopérabilité ? Si c’est le cas, quel y serait le rôle des normes et des standards ?

Rappelons d’abord que l’avantage des TIC est, entre autres, de fluidifier la circulation de l’information. Le flux considérable d’information a été à l’origine des changements qui ont marqué presque tous les rapports entre les acteurs de la société de l’information. L’architecture en réseau des systèmes d’information et de communication et le développement des réseaux de transmission de données ont favorisé la conception de formes innovantes dans la coopération entre les individus, les groupes et les entités, affectant de la sorte les secteurs connexes comme la recherche et le développement (R&D).

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Source : Wold Dominique (Economie de l’innovation, 2010)

L’une des conséquences directes de ces changements dans les modes de collaboration de la R&D est sans doute l’accélération des rythmes de l’innovation. Le fait pour les TIC de raccourcir les temps de transition entre les phases du circuit classique « technologies, services et usages », accentue le facteur de récurrence de cette boucle et rend, par conséquent, le rythme de l’innovation de plus en plus court et permanent.

De ce fait, les normes techniques deviennent un indicateur indispensable de la diffusion des TIC. Cela conduit à mettre l’accent sur un rapport statistique entre l’innovation mesurée par les brevets et la normalisation mesurée par les standards de jure, éditées par les organismes de standardisation. Un lien de causalité se fonde sur l’idée suivante : un pool d’innovations sera condensé en un ensemble de normes techniques. Par conséquent, une augmentation ou une diminution des innovations dans un domaine technique particulier, conduit à une augmentation ou une diminution du nombre de nouvelles normes techniques dans ce domaine.

D’un point de vue stratégique, l’innovation est considérée comme très ancrée dans les processus normatifs. Chaque cycle de normalisation doit naturellement conduire à une conciliation entre engouement pour l’innovation et besoin d’une stabilité relativement durable pour permettre l’exploitation des innovations engendrées. L’une des méthodes envisageables, selon Feneyrol (2006) serait de : « mettre en compétition plusieurs filières et de trouver un compromis qui essaie d’optimiser les avantages venant de plusieurs voies de recherche. La norme qui en résulte est alors commune et ouverte ».

Autre rôle essentiel que jouent les normes et les standards dans le processus de l’innovation technologique, ils participent considérablement à la baisse des coûts et des tarifs en générant des économies d’échelle et une concurrence entre les équipementiers. Les normes et les standards peuvent aussi être une arme à double tranchant : ils peuvent avoir la meilleure ou la pire des conséquences sur toute forme d’innovation. Mais tant qu’ils participent à la genèse de nouveaux services et usages en soutenant l’interopérabilité des différents éléments de la chaîne des valeurs et le libre choix de l’utilisateur, ils apportent le meilleur des effets : contribution, en amont du processus de régulation, à la mise en place d’une concurrence ouverte qui dynamise les marchés de l’innovation. La concurrence par l’innovation devient ainsi une force motrice du marché des technologies.

Les études approfondissent l’analyse de cette dialectique complexe de la concurrence en indiquant qu’à mesure que l’incertitude autour de la rivalité inter système augmente, il devient de plus en plus difficile pour les entreprises de proposer davantage de produits complémentaires à certains équipements de base. Les utilisateurs s’abstiennent de plus en plus à leur tour de s’engager sur le marché de la consommation, et tous les deux restent conditionnés par le doute sur le coût de l’obsolescence technologique associé à une norme qui risque de ne pas devenir dominante.

Les normes jouent donc un rôle important dans l’émergence de nouveaux produits et de nouvelles technologies et dans la détermination des règles de concurrence autour de l’innovation. Dans un environnement économique mondial, les grands marchés favorisent une diffusion plus rapide de nouveaux produits, services et modèles d’organisation conduisant à une utilisation plus large et efficace des normes. Il existe beaucoup d’exemples de technologies novatrices qui ont été initialement développées à un niveau local d’entreprise et qui sont devenues des applications industrielles d’envergure mondiale. Les éléments qui peuvent soutenir de tels succès commerciaux et conduisent à de réels changements diffèrent d’un cas à l’autre. Ce qui est toutefois évident, c’est qu’aujourd’hui, les innovations techniques ne peuvent pas se développer sans un environnement favorable, tant du côté de l’offre que de la demande. Plus le rythme économique moderne des entreprises est élevé, plus il est nécessaire que celles-ci planifient à l’avance pour construire des avantages concurrentiels à long terme.

En réalité, ce débat s’inscrivait dans une stratégie de positionnement et de visibilité sur les marchés de l’industrie informatique et téléinformatique. À part les mesures conventionnelles des stratégies marketing, les grandes sociétés utilisent aujourd’hui de nouvelles méthodes d’analyse des marchés pour prévoir les meilleures pistes de l’innovation et anticiper les fluctuations dans le choix des consommateurs pour telle ou telle technologie innovante. L’une de ces méthodes est proposée par la société américaine Gartner Inc., sous le nom de Hype Cycle.

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