Community manager !?

Dans le courant des nouveaux métiers du numérique qui caractérisent le paysage médiatique en général, la fonction de Community Manager (gestionnaire de communauté) prend de l’importance et devient un métier à part entière. Comparé au rôle des influenceurs sur les réseaux sociaux, le rôle du Community Manger devient aussi déterminant dans le profiling ou la détermination des profils de comportement d’achat et/ou de consommation. Au-delà du sens commun de modérateur connu sur les réseaux sociaux, un Community manager prend progressivement les traits d’un professionnel du marketing responsable de la gestion et du développement de la communauté en ligne d’une entreprise. Entre modérateur d’un groupe social sur Internet et un gestionnaire de communauté, les lignent se précisent même si les deux peuvent cohabiter, voire être assurés simultanément par la même personne.

Une histoire d’évolution

Dès l’émergence et l’expansion des technologies modernes, les groupes et individus ont pu très vite s’approprier le fort potentiel communiquant du numérique pour disposer d’une nouvelle forme de communication quasi instantanée à l’échelle mondiale. Dans presque tous les domaines d’activité qui ont trouvé point d’attache sur les réseaux, des communautés virtuelles se sont rapidement créées autour d’un nombre indéterminé de sujets : actualités, éducation, santé, commerce, renseignements, etc. Des outils et systèmes ont alors été développés pour permettre de véhiculer les contenus de ces échanges sur Internet puis sur le Web et de créer une expansion multidimensionnelle des réseaux d’information et de communication mondiales. C’est pour dire que les services actuels d’information et de communication ont des racines qui remontent à la fin des années 1960 et donc qu’il a fallu moins d’un demi-siècle pour passer du courrier postal à une communication instantanée avec n’importe qui dans le monde. Les usages se sont alors structurés et multipliés en formes et contenus autour de thématiques portées par des communautés de pratiques qui les ont promues ou ont contribué à leur disparition.

Un tournant historique clé est survenu dans les années 1980 et le début des années 1990 avec le développement d’Internet lorsque de nombreuses personnes ont réalisé le besoin croissant de pouvoir rechercher, échanger et organiser des données et des informations par des moyens numériques à distance. Considérés comme pionniers de cette époque, des services comme Gopher, WAIS, Archie et les archives FTP et Usenet ont été à l’origine de ce monde virtuel numérique où l’information était organisée de manière virtuelle et distribuée. Sous l’effet de la modernisation et l’impulsion de la concurrence, la dynamique exponentielle de l’Internet s’est mise en route pour ne plus s’arrêter. A croise les études qui rendent obsolète la loi de Moore[1], l’innovation technologique va crescendo au point de pousser des figures emblématiques comme Elon Musk et Stephen Hawking[2] à s’interroger sur les risques du développement de l’intelligence artificielle et des « robots tueurs » pour l’humanité.  Bref, au début des années 1990, Gopher, qui offrait une alternative viable au World Wide Web, a dû céder place au World Wide Web en 1993 quand ce dernier avait commencé à proposer de nombreuses avancées en matière d’indexation et de facilité d’accès via les moteurs de recherche. Dès le milieu de 1994, la popularité du WWW a pris le dessus grâce à l’un des paradigmes d’interface utilisateur qui ont le plus marqué l’évolution de l’Internet : l’hypertexte. Cette technologie qui avait libéré les usages de la rigueur du langage informatique, accessible uniquement aux initiés, avait participé de la démocratisation du numérique et de son ubiquité et résilience. Inspirée par le « Memex » de Vannevar Bush[3] et développée grâce aux recherches de Ted Nelson sur le projet Xanadu et les recherches de Douglas Engelbart[4], l’hypertexte a anticipé l’émergence d’interfaces machines intuitives et facilement maitrisables pour tous. L’utilisateur final s’approprie alors la machine et l’utilise à son compte en substitut de ses méthodes classiques de communication (courrier, télégraphe, téléphone, fax). Aussitôt, les forums et les communautés sont apparus sur Internet regroupant des communautés d’utilisateurs qui partageaient des idées autour d’une motivation commune (musique, jeux vidéo, cinéma, voyage, apprentissage, commerce, etc.). Mais la complexité des ressources (multimédias) et l’accroissement des flux avait progressivement imposé le besoin d’intervenir pour modérer les espaces exposés au chaos des contenus (non structurés) et aux dérives des propos (nétiquette). Le concept de modérateur est alors apparu pour prendre aujourd’hui la forme de Community manager.

Actuellement, il existe encore des forums, mais la conversation couvre davantage de plates-formes – les réseaux sociaux tels que Facebook, Instagram, Twitter, TikTok, les blogs, entre autres. Et sur ces plateformes se trouvent aussi les marques et leurs représentants, à savoir les Social media managers et les Community managers.

Modérateur ou Community manager ?

Lors du lancement d’une communauté en ligne, il y a toujours des questions auxquelles il faut répondre, et souvent des analyses de rentabilisation qui doivent être présentées. Une question qui revient souvent est : « quelle est la différence entre un gestionnaire de communauté et un modérateur ? », généralement suivie de « pourquoi avons-nous besoin des deux ? ». Ceci traduit le fait qu’il y a encore de la confusion dans certains domaines sur la différence entre les deux profils, et cette confusion, dans les bonnes circonstances, peut conduire au chaos.

Source : Corinne L (2021)

Pour en dire un mot, bien que les responsabilités puissent varier d’une communauté à l’autre, dans la plupart des cas, les rôles se dérouleront très probablement selon un précédé bien précis.

Pour un Community Manager, ses tâches sont plutôt de la supervision. Il doit quasiment tout savoir sur sa communauté, ses problèmes et comment les résoudre. Il est ainsi responsable de la définition de la politique, de la détermination de la manière d’amener la communauté à un résultat souhaité et de l’y maintenir. Ses préoccupations sont de l’ordre de la création des directives et des politiques communautaires, de la conception et configuration de la structure communautaire, de la définition des rôles et des responsabilités dans les interactions au sein de la communauté, de l’élaboration des plans de communication pour les membres de la communauté, bref de diriger et gérer les modérateurs lorsqu’il y en a pour la communauté.

En revanche, parmi les rôles d’un modérateur, il y a notamment l’application des directives et des politiques de la communauté, l’aide à maintenir une atmosphère positive et à répondre aux signalements d’abus, le soutien aux membres et l’aide dans l’organisation et la conduite d’événements et de programmes. Il est plus dans l’exécution et le déroulement que dans la conception et la stratégie.

Vers une professionnalisation de la tâche

Alors que la modération a souvent existé en tant que pratique volontariste ou intégrée à un profil métier plus large, la gestion des communautés devient progressivement un métier à part entière. Les entreprises constatent désormais qu’un nombre croissant de consommateurs sont familiarisés avec l’utilisation des réseaux sociaux comme lieu de recherche d’informations et d’opinions sur les produits et les marques. Les clients ont de plus en plus l’habitude de consulter les opinions des consommateurs avant de s’engager dans un acte d’achat en ligne. Cette tendance consumériste a inévitablement influencé les stratégies marketing des entreprises. La participation directe des clients sur les sites Web de produits ou de marques particulières est devenue une source d’opportunités que les entreprises souhaitent exploiter comme stratégie de vente. C’est dans ce contexte qu’a émergé la figure du Community manager ou gestionnaire de réseaux sociaux afin d’établir des liens forts entre les utilisateurs et l’entreprise, une relation qui se traduit par des intérêts commerciaux.

Le métier de Community Manager est désormais très recherché car les entreprises se rendent compte qu’elles ont besoin d’un profil métier à part entière qui soit seul responsable de la gestion de leurs réseaux sociaux, d’autant que la majeure partie du trafic Internet se fait désormais par ce biais. Il est dès lors fait appel à un Community Manager pour prendre en charge la publication du contenu sur les réseaux sociaux comme Facebook, Twitter, Instagram ou tout autre réseau social de l’entreprise. Ces outils et services traduisent la forte conscience qu’ont les entreprises de l’impact que la réputation de leurs produits et la satisfaction des clients ont sur la croissance de leurs chiffres d’affaires.

Source : Les Community managers en France – 2016 » @ Le blog du modérateur

Formation ou improvisation ?

De nos jours, il existe de nombreuses façons d’acquérir les compétences d’un Community Manager aussi bien par le biais de la formation que par la pratique et l’empirisme. On a tous des compétences variées dans l’utilisation des réseaux sociaux mais il n’est pas évident que nous connaissons tous les mécanismes cachés du fonctionnement de ces réseaux ni leurs effets subtils sur le comportent des utilisateurs. À n’en citer que l’exemple des grands dossiers à scandale comme Cambridge Analytica ou les différentes affaires de Facebook relatives à la revente des informations personnelles des utilisateurs, aux polémiques sur la propriété des contenus, etc.

Afin de parfaire ses compétences et être averti sur les dérives sur les réseaux sociaux, il est fortement recommandé à tout Community manager de se former en suivant des cours sur le sujet. En fait, il existe en ligne une grande variété de supports dédiés à ce sujet particulier qui donnent des certifications et toutes les connaissances dont un Community Manager a besoin pour remplir efficacement son rôle. L’une des conditions nécessaires pour avoir un statut de Community Manager professionnel est de démontrer une passion pour les réseaux sociaux. De plus, il est important d’avoir une bonne empathie, de développer la créativité et l’ingéniosité, ainsi que la capacité d’établir des relations via Internet. Outre ces qualifications, un Community Manager expérimenté aura des capacités avérées dans la gestion des crises, le service client, la rédaction des contenus, la narration, la connaissance des mécanismes publicitaires (sponsoring) sur les réseaux sociaux, etc.

 

Lectures proposées

Notes

  1. [1] Loi de Moore. http://www.benhenda.com/fra/?p=451
  2. [2] Morgane Tual. « Stephen Hawking et Elon Musk réclament l’interdiction des « robots tueurs ». Le Monde du 27 juillet 2015
  3. [3] Vannevar Bush. http://www.benhenda.com/fra/?p=158
  4. [4] Douglas Engelbart. http://www.benhenda.com/fra/?p=455

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