Seymour Papert et le langage Logo
Seymour Papert a été parmi les premiers à reconnaître le potentiel révolutionnaire des ordinateurs dans l’éducation. À la fin des années 1960, à un moment où les ordinateurs coûtent encore des centaines de milliers de dollars, Papert a proposé l’idée de Logo, la première langue de programmation pour les enfants.
L’un des pionniers de l’apprentissage ludique est sans doute le mathématicien et cybernéticien sud-africain Seymour Papert, collaborateur ayant accompagné Jean Piaget dans les travaux du Centre international génétique à Genève. Il fut sans conteste l’une des sources les plus originales de développement de la théorie constructiviste de l’intelligence. En 1963, il part s’installer à Boston pour travailler successivement au laboratoire d’intelligence artificielle puis au Media Lab du célèbre Massachusetts Institute of Technology (MIT), aujourd’hui leader mondial de la cybernétique. Il y participe avec Marvin Minsky à développer un programme de recherche en intelligence artificielle sur la théorie de la société de l’esprit mais s’intéressa surtout à l’usage de l’informatique dans le processus de l’apprentissage chez l’enfant. De cet intérêt naquit en 1967 son célèbre langage de programmation Logo très prisé à son temps dans le monde de l’éducation.
Le langage Logo concrétise une rencontre empirique entre le courant cognitiviste en intelligence artificielle de Minsky et le constructivisme de Jean Piaget. Il permet, dans sa principale application pédagogique, de saisir des instructions qui permettent à une tortue stylisée en forme de triangle de se déplacer en traçant des formes géométriques comme si elles sont dessinées au crayon sur du papier. Par ce principe résolument constructiviste, puisqu’il se base sur l’apprentissage par l’erreur, le jeu est clairement adapté à toutes les disciplines. À travers les instructions du langage Logo (rebaptisé Lego-Logo), les enfants construisent des processus de tout genre comme des robots avec des comportements, de la musique, des formes géométriques, etc.
Logo constitue aussi un virage important dans l’ingénierie des interfaces graphiques homme-machine. Il libère la programmation informatique pour l’enfant de la rigueur des lignes de commande, ces instructions complexes et sensibles à la casse saisies au clavier. Dans son ouvrage “In the Beginning was the Command Line”, Neal Stephenson, auteur américain de science-fiction, considère l’interface graphique comme une métaphore d’abstraction entre les humains et le fonctionnement réel des dispositifs informatiques. « Les interfaces graphiques étaient une brillante innovation de conception qui rendait les ordinateurs plus centrés sur l’homme et donc accessibles aux masses, nous conduisant vers une révolution sans précédent dans la société humaine » (Stephenson, 1999:8).