HD-MUREN, un projet en Humanités numériques
Le projet HD-MUREN est proposé dans le cadre de la Chaire UNESCO-ITEN à Paris 8. Il s’inscrit dans le cadre plus vaste d’Idéfi-Créatic. Son objectif est de proposer une synergie d’action entre enseignement, gestion de corpus par crowdsourcing et conservation du patrimoine. La réforme de l’enseignement en France par le numérique et l’instauration d’un Bac Humanités numérique augurent d’un rôle plus important que devraient jouer les Sciences humaines et sociales dans l’appropriation de l’outil informatique pour une meilleure gestion du patrimoine virtuel.
L’idée princeps du projet HD-MUREN, proposé dans le cadre de la Chaire ITEN-Unesco-Paris 8 et qui s’inscrit dans le cadre plus vaste d’Idéfi-Créatic[1], consiste à utiliser des cohortes volontaires de lycéens ou d’étudiants en première ou deuxième année pour leur faire réaliser de façon participative des corpus numériques à partir de textes littéraires, puis dans une deuxième phase d’humanistes français et arabes. Pendant cette étape initiale, ces lycéens ou étudiants sont impliqués dans des projets d’enseignement-recherche ce qui leur permet d’approfondir leurs compétences de balisage littéraire savant (de poèmes par exemple), d’affiner la description métrique, d’analyser des figures de stylistiques etc. En associant en synergie un enseignant et un chercheur (ou un groupe de chercheurs), l’enseignant peut ensuite impliquer les lycéens ou les jeunes étudiants dans des processus plus complexes par exemple pour le repérage des variantes et des incertitudes d’interprétation dans un apparat critique[2] désormais numérique, la description savante de manuscrits et leur mise en parallèle avec leur transcriptions, la mise en parallèle de traductions, etc.
Par ce procédé, nous élargissons le champ de l’interprétation (propre aux sciences humaines) en l’associant à une activité parallèle de production participative de ressources patrimoniales numériques en milieu scolaire qui renforcerait le processus d’interprétation et d’acquisition de valeurs humanistes chez les apprenants. Notre approche se fonde sur l’idée que l’acte pédagogique ne doit pas se contenter d’être uniquement un vecteur de transmission de savoirs, mais doit être aussi un incubateur, mais surtout une fabrique de valeurs citoyennes et civiques susceptibles même, dans certains cas, d’élargir l’objet enseigné. La production de données en Humanités serait ainsi dédoublée, voire aussi augmentée d’un processus interprétatif proactif permettant à l’apprenant d’acquérir de manière subliminale des valeurs citoyennes et humanistes véhiculées par les données qu’il traite.
Pour tester et expérimenter ces assertions et hypothèses, notre projet de recherche a une double articulation. Au-delà de la façade des compétences technologiques à expérimenter dans un cadre scolaire, il vise à évaluer chez des jeunes apprenants non seulement leurs pratiques numériques, mais leur capacité à s’approprier des ressources humanistes « ouvertes », notamment des contenus savants, littéraires ou philosophiques.
Notre idée de production numérique participative (crowdsourcing) vise à répondre à l’enjeu stratégique de pouvoir disposer en libre accès d’un réservoir de ressources numériques et culturelles massivement ignorées par les acteurs marchands du Net (notamment Google). On se rend compte en effet que si des acteurs importants comme Gallica mettent à disposition de nombreuses ressources culturelles, celles-ci sont souvent soumises à beaucoup de restrictions dues aux droits d’auteurs, aux volumes des données prohibitifs pour les réseaux à bas débits, aux restrictions concernant l’impression et la sauvegarde, etc. Par la structuration numérique des œuvres humanistes en employant les techniques de la Text Encoding Initiative (TEI), nous inscrivons le projet dans la dynamique internationale de l’Open Source et Open Data et de l’accès universel aux savoirs.
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[1] idefi-creatic.net
[2] Cette notion rarement étudiée dès le niveau du secondaire et pourtant facilement compréhensible par des digital natives dans la mesure où de multiples dispositifs logiciels (dans les jeux, dans les réseaux sociaux) utilisent des mécanismes logiques et hypertextuels similaires.